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50 Shades of GenAI, par Matthieu Vercruysse (Ogilvy/WPP)

Jeudi 22 Février 2024

50 Shades of GenAI, par Matthieu Vercruysse (Ogilvy/WPP)

Il est temps d'adopter une approche nuancée de l'intelligence artificielle. En effet, les conversations autour de l’IA tendent souvent à la généraliser, la considérant comme une technologie unique, un seul phénomène homogène et uniforme. La réalité est bien plus nuancée, caractérisée par un large spectre d'applications aux capacités et fonctionnalités différentes, aux cas d'usage et aux impacts très variés à travers différents domaines des entreprises.

Des usages très variés entre les équipes

Dans le domaine du marketing, pour une agence par exemple, un Strategic Planner n’en fera pas du tout la même utilisation et n’aura pas les mêmes attentes qu’un Art Director, qu’un Motion Designer ou encore qu’un Media Buyer. Ils sont tous confrontés à des besoins et à des outils totalement différents, qu'il s'agisse de génération de textes ou d'image, d’analyse de datas ou d’algorithmes.

Nous pouvons nous faire exactement la même représentation que des équipes qui utilisent actuellement différents logiciels pour des usages très variés : de Word à Excel, en passant par Photoshop et Keynote (qui se chamaillent d’ailleurs avec les utilisateurs de Powerpoint).

Cette diversité des usages et des attentes est exactement la même pour l’IA. En exagérant à peine, nous pourrons bientôt compter 50 types d’usages différents d’IA dans une même entreprise.

Il est donc désormais essentiel de comprendre en détails ces nuances pour organiser une adoption mesurée et stratégique.

Comprendre les limites et les "performances inattendues"

Pour une approche nuancée - en parallèle à la compréhension de la longue liste des opportunités -, il est également nécessaire de comprendre les limites actuelles de l’IA.

Une équipe de recherche au Boston Consulting Group (BCG) pointe le fait que les forces et les faiblesses de la Generative AI sont souvent “inattendues”. En effet, la performance de l'IA peut surprendre, excellant dans des tâches complexes… tout en trébuchant sur les tâches les plus simples. Ce qui peut être compromettant si un sens critique n’est pas appliqué ou un protocole de Quality Control n’est pas structuré.

Et nous n'en sommes encore qu’au stade de découverte de ces ratés majeurs des outils. Nous avons découvert avec sourire les six doigts sur les mains des images générées par IA, mais nous ne voyons pas toujours une erreur similaire dans un rapport de datas.
 
En effet, alors que les résultats de certains prompts sont impressionnants, ils peuvent également être vraiment médiocres. Un exemple simple : ChatGPT sera très inexact dans le comptage du nombre de mots d’un texte. Tache pourtant très simple. Cependant l’outil pourra facilement vous aider à coder un software qui servirait à compter les mots de ce même texte. Tache beaucoup plus complexe. Surprenant non ?

Cette dualité des résultats “impressionnants” ou “décevants” fourni par les outils d’IA est une considération cruciale pour l’adoption par les entreprises. C’est ce que, dans le Financial Times, Tim Harford appelle “naviguer la frontière irrégulière" de la performance de l'IA : il suggère une approche stratégique dans la sélection des outils IA, et de nous concentrer précisément sur l'adéquation pour des tâches spécifiques.

Compréhension stratégique de la collaboration humain-AI

Le défi actuel n'est pas seulement de naviguer à travers le paysage complexe de l'IA, mais de le faire avec une compréhension profonde de la collaboration avec les équipes. L'IA fonctionne rarement de manière isolée. Elle nécessite une direction et une supervision humaine, soulignant le besoin fondamental d'une approche collaborative avec l'intelligence humaine. Ce point implique donc une transformation des équipes.

Il y a lieu de considérer la multitude de tâches auxquelles une équipe fait face et de considérer comment l’IA peut aider ou automatiser des portions de ces tâches, avec quel input nécessaire et quel output attendu. Il s’agit ici d’une redéfinition en détails de la chaine de valeur, métier par métier, équipe par équipe. Encore une fois, tout en nuance !

Enfin, la maturité de la technologie demande également une compréhension nuancée.

Prenons l'exemple récent de l’annonce du lancement de Sora par OpenAI qui a inondé les publications LinkedIn dès son annonce. Sora étant apparemment capable de générer des vidéos de 60 secondes d’une qualité très impressionnante au départ d’un simple texte (prompt). Bien que très probablement révolutionnaire pour l’industrie audiovisuelle, il faudra reconnaître que Sora n'est pas encore réellement disponible. Et que à ce stade, Dalle-3, un autre produit d'OpenAI, produit des images statiques d’une qualité intéressante… mais bien moindre que la qualité des vidéos présentée dans la démo de Sora. Cette disparité souligne l'importance de modérer notre enthousiasme avec une perspective réaliste sur les technologies IA actuellement disponibles et leur potentiel à court terme.

En conclusion, l'adoption de l'IA dans le business, et plus spécifiquement dans le marketing ou les agences, exige une compréhension nuancée - 50 fois nuancée - qui reconnaît la diversité et la spécificité des applications. Plutôt que de voir l'IA comme une solution unique… et magique.

Les entreprises sont encouragées à adopter une approche stratégique, consciente des avantages et des limites des différents outils IA. Au-delà des nouvelles fonctionnalités et des annonces vers une transformation significative de l’organisation par des use cases concrets. Ce qui implique d'auditer la situation actuelle, de définir des objectifs globaux pour l'organisation, d'identifier les domaines d'adoption, et de prioriser les tests, les betas, les prototypes avant de learn & scale.

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