La croisière peut-elle atteindre zéro émission nette ?

Poser la question, c’est déjà y répondre. Personne n’y croit. A part évidemment MSC Cruises, dont le fil rouge de la nouvelle campagne de com’ « à grande échelle » (normal pour un armateur) nous fait découvrir "Le Futur de la Croisière" dans un joli spot TV plein de bonheur et de couleurs, agrémenté d’un bon gros dossier de presse de l’agence RCA qui nous rappelle que « MSC Cruises est depuis longtemps engagée dans la préservation de l'environnement ».  
 
On y apprend que le film a été tourné à bord du MSC World Europa, le fleuron de la flotte, mis en service en octobre 2022. Comme ne l’indiquent pas forcément ses 2.633 cabines, 13 restos, son toboggan architectural de 11 étages, ses sept piscines, son parc aquatique et ses auto-tamponneuses, c’est tout simplement le paquebot MSC « le plus avancé sur le plan environnemental » qui plus est, propulsé au GNL (gaz naturel liquifié).
 
Selon le croisiériste, il s’agirait « du carburant qui présente le plus faible taux d’émissions de carbone aujourd’hui disponible », tout en précisant - car ils sont de bon compte chez MSC - « à l’échelle dont nous avons besoin. » C’est bien simple, nous enseigne le dossier de presse, « comparé aux carburants marins traditionnels, le GNL élimine presque toutes les émissions de particules, notamment les oxydes de soufre et les particules fines, réduit considérablement les oxydes d'azote et permet déjà une réduction du CO2 allant jusqu'à 25%. »
 
Mais il est d’autres cornes de brume…
 
En réalité, comme le rappelle l’ONG Transport & Environment (T&E), les navires propulsés au GNL libèrent d’importantes quantités de méthane - un gaz à effet de serre - dont est composé à 90% ledit carburant. Et selon les Nations Unies, le GNL aurait même un impact 80 fois supérieur à celui du CO2 sur 20 ans ! 
 
Pour Delphine Gozillon, chargée du transport maritime au sein de T&E, le verdict est sans appel : « Ils peuvent se draper de vert, mais sous le voile, la vérité est que la plupart des navires au GNL en service aujourd’hui sont plus nuisibles pour le climat que ceux qu’ils remplacent. » Pour elle, présenter le GNL comme un carburant durable est ce que l’on peut appeler du flagrant délit de greenwashing.
 
Plus globalement, comme le notent nos amis de Climax, dans son rapport sur le développement durable, MSC se félicite d’avoir « atteint une réduction de 28 % de l’intensité des émissions » de CO2 entre 2008 et 2020. Pourtant, un tableau sur la même page permet de calculer une hausse de 38% des émissions totales de CO2 des navires sur la même période. Et pour cause : bien que chaque kilomètre émette moins de CO2, les distances parcourues ne cessent d’augmenter, à l’unisson de la flotte MSC qui nous a inondés de 10 nouveaux paquebots entre 2017 et 2023. Normal, il faut bien que la croisière s’amuse !  
 
Et quitte à cramer du CO2, autant de en profiter un max : au moment de boucler ces lignes, MSC nous gratifiait d’un nouveau dossier de presse qui annonce une toute nouvelle virée de 116 nuits autour du monde à bord du MSC Magnifica prévue en janvier 2025. L’autre bonne nouvelle, c’est qu’en réservant maintenant, vous bénéficierez de 30% de remise sur le service de blanchisserie !