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Yves De Voeght, sans amalgames avec Target Victory

Mardi 27 Mai 2025

Yves De Voeght, sans amalgames avec Target Victory

Doit-on encore présenter Yves De Voeght ? Cet ancien annonceur très impliqué dans notre secteur qui a notamment passé 13 ans chez Coca-Cola et plus de 16 chez Unilever, a décidé de consacrer sa dernière décennie professionnelle à des sujets « plaisants et utiles ». Dont un en particulier : Target Victory

Lancé il y a un peu plus de trois ans avec Zelos (Freddy Tacheny), le projet est devenu depuis un petit écosystème dont l’objectif double vise à soutenir le handisport de haut niveau, mais aussi ou surtout, faire évoluer la perception des personnes dotées d’un handicap en milieu professionnel. 

Les plus belles performances ne seraient pas forcément aux lignes d’arrivée classiques, comme nous l'explique Yves De Voeght. 

Rappelez-nous tout d'abord quand et comment est né le concept de Target Victory et pourquoi vous l'avez embrassé ?

La date est difficile à préciser, d’autant que ce type de projet se prépare. Je voudrais même remonter à une période lointaine pour évoquer ma première prise de recul, quant à ma destinée professionnelle. C’était vers 2002, lorsque Walter Gelens qui était mon boss chez Unilever m’a proposé de poursuivre ma carrière mais à l’étranger, ce que j’ai refusé. Une étape qui m’a obligé à une réflexion de fond "provoquée". Déjà à l’époque, je percevais l’envie de terminer mes activités, disons les 10 dernières années, par du socio-culturel. J’ai vécu une autre étape entretemps, mais je suis depuis toujours attaché au sociétal. Je savais que le rendez-vous se ferait un jour et c’est le cas depuis mon départ de Coca-Cola.

Depuis toujours... voulant dire, vous aviez déjà actif dans l’une ou l’autre cause ?

Oui déjà comme étudiant. J’ai eu la chance de participer au lancement des Restos du Cœur en Belgique. Je dirais que c’était du sociétal avant l’heure. Et puis j’ai été exposé à différents événements médiatiques comme le Télévie ou les actions de Cap48. A l’occasion de mon départ de Coca-Cola, j’ai parlé de mes envies à Yves Gérard (CEO de RMB, ndlr.) qui m’a présenté Renaud Tockert (l'Administrateur-délégué de Cap48, ndlr.). Puis j’ai retrouvé Freddy Tacheny (fondateur de Zelos, ndlr.) qui avait justement  créé un projet avec Cap48 , qu’il m’a proposé de reprendre pour le dissocier du travail de sa régie. Ce que j’ai fait en le redéfinissant et  le renommant Target Victory. 

Le but premier étant de soutenir le handisport de top niveau et, me concernant, d’aller chercher des revenus. Sachant que le  Belgian Paralympic Committee (BPC) s’occupait déjà du sponsoring pur… J'ai donc mis en place une série de partenariats avec notamment Serviceplan, Business Elements et D’Ieteren au travers de mes contacts avec Nancy Delhalle, Peter Vande Gravele, Laurent Deramaix et José Fernandez. 

Target Victory veut donc renforcer les moyens des compétiteurs via G-Sport Vlaanderen, la Ligue Handisport Francophone et Zelos, qui complète la démarche pour les disciplines non couvertes par les deux ligues.

C’est donc une organisation nationale ?

Oui, mais dont la fondation était plutôt francophone, élément que nous avons voulu corriger par l’engagement d’un responsable néerlandophone. Sa vocation sera d’aller chercher des partenariats et revenus auprès de cette région. Il s’agit d’Erhard Jacquemyns (il a notamment fait carrière dans les médias audiovisuels, dont Var pendant de longues années, ndlr.) et son arrivée est récente. Je souligne ici que G-Sport Vlaanderen reçoit de Target Victory plus de financement que la ligue francophone… Notre biais d’origine n’a pas d’impact sur le résultat. Mais pour aller chercher des budgets au nord, c’est plus difficile, donc notre nouveau collègue va bien nous aider. Il faut des connexions avec affinité par région, notamment pour les partenariats.

Sur le plan des revenus, justement, on parle de combien ?

Dans sa première phase francophone, le projet ramenait moins de 100.000 euros. Mais depuis son extension nationale en 2022, nous avons dépassé les 300.000 euros. Mes prévisions pour cette année se situent aux alentours de 370.000. A noter qu’une partie provient de Cap48, qui amplifie les dons pour le dire ainsi. Nous sommes devenus la troisième source de financement pour le handisport de haut niveau, après les instances publiques, le gouvernement et le BPC.

Vous parlez au pluriel, mais à la base vous étiez seul ?

A l’origine, mais j’ai bénéficié du support de Zélos pour les aspects web, administratif et communication dès le départ, ce qui est important.

Quels types de partenariats proposiez-vous à la base ?

En résumé, un modèle passif, et un actif. Voulant dire pour le premier, la capacité du "sponsor" à utiliser des photos ou visuels dans sa communication. Lesquelles représentent les sportifs à l’action, par exemple. Dont commentaires ajoutées du genre : « Nous les soutenons ». Le second modèle permet à l’entreprise de développer son propre matériel de communication, à l’instar de D’Ieteren, ou de Serviceplan qui a notamment organisé des conférences avec les athlètes dans le cadre de ses réunions "Unmissable". Ceci étant, tout cela n’était pas vraiment suffisant sur le plan des recettes…

Vous avez décidé d’élargir les propositions

En effet. De par mon expérience professionnelle, j’ai pensé à revendre de l’inventaire média. Il me fallait trouver des espaces et le premier à participer a été Clear Channel : nous avons obtenu deux réseaux digitaux dont les recette ont été reversées à Target Victory. Les marques bénéficiaires ne devaient pas réaliser une campagne particulière, c’était simplement du courtage. JCDecaux a suivi, et cette source est maintenue, pour se développer.

Pourquoi vous êtes-vous focalisé sur ce thème des grands compétiteurs du handisport ? Il y a un côté un peu élitaire dans cette démarche, non ?

Oui mais justement : ce sujet est plus qu’exemplatif, il est exemplaire au sens premier. Il prouve que malgré un handicap physique, une personne est capable de performances assez incroyables. Le véritable but derrière est de faire évoluer le regard que l’on jette sur ces personnes soi-disant "diminuées", spécialement dans un environnement professionnel. Dans les faits, elles accomplissent des efforts très importants par motivation, tandis qu’un individu lambda comme vous et moi, va trouver toutes sortes d’excuses pour ne pas faire son petit sport hebdomadaire. Vous avez autre chose que l’effort physique ici, vous avez des valeurs mentales. En cela, les entreprises pourraient être très inspirées de recruter ces profils plutôt que de s’inquiéter de la qualité de leurs prestations.

Je pense qu’un handicap vous force à une motivation supérieure pour accomplir de nombreuses tâches, en général. Ici nous sommes sur des personnes qui méritent la lumière des médias, et le "earned media" donne peut-être plus d’amplification à la cause. Par ailleurs, ces sportifs manquent réellement de moyens, et un autre message que nous voulons faire passer est que les belles performances ne s’obtiennent qu’avec une bonne préparation, de l’accompagnement technique et humain.

Notez au passage que le handisport de compétition obtient de plus en plus de succès. C'est un cercle vertueux qui suscite de plus en plus d’audience et d’intérêt de sponsors. Prenez les JO à Paris : les médias n’ont jamais autant parlé de la phase paralympique. Et vous avez d’autres organisations qui complètent le travail, notamment le BPC que j’ai évoqué. Le handisport concerne de plus en plus d’athlètes, et les médias relaient leurs succès de façon croissante.

Qu’avez-vous encore développé comme outils d’activation ?

Nous avons estimé en 2024 qu’il fallait augmenter le financement en général vu la tendance, et développer des espaces propres à nous. Avec Brightfish et Kinepolis, nous avons organisé une avant-première du film "Joker : Folie à deux" 2. L’événement a été revendu à un annonceur. Cette année, nous en réalisons deux nouveaux : un dîner gastronomique avec Eric Boschman dénommé "L’accord parfait" et se déroulant en septembre à TheMerode, et dans un autre genre, un tournoi de padel au Montjoie à Uccle avec des parasportifs associés à des personnalités publiques et business. 

Nous avons aussi développé des partenariats avec NGroup, pour des enregistrements de podcasts évoquant la vie ou des expériences de certains athlètes concernés. Lesquels sont diffusés sur les médias de NRJ.

Vous restez ambitieux pour l’avenir, pour le développement de ces revenus ?

Certainement, et je ne suis pas seul à y croire. Freddy Tacheny qui est particulièrement actif dans l’accompagnement du projet, rêve d’un million à l'horizon 2028... À la réflexion, ce n’est pas si irréaliste. Cela semble énorme mais c’est 5% du résultat Unicef, par exemple. L’accélération pourrait venir de la VRT ou d’un autre porte-voix média, il faut de bons relais. Nous avons aussi un projet en lien avec LN24 qui pourrait devenir un média-pilier dans les mois à venir.

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