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Karin Van Passel (d-side group) : "Les agences événementielles croulent sous les demandes"

Dimanche 27 Février 2022

Karin Van Passel (d-side group) :

Comment organiser des événements de manière efficace dans l'après-crise sanitaire ? Voilà la question à laquelle l’ACC souhaite répondre dans sa campagne B2B "Planifiez votre événement bien à l’avance". Karin Van Passel, Account Manager de d-side group et présidente de l’Expert Center Event Marketing de l’ACC, fait le point sur le situation du secteur.

Tout d’abord, de quelles entreprises s’agit-il lorsqu’on parle de l’événementiel ?

C’est un secteur très diversifié qui déploie toute une gamme d’activités : événements B2B ou B2C, festivals, exploitation de sites événementiels, fournisseurs, traiteurs, etc. La pandémie a poussé tous ces acteurs à se regrouper au sein d’une même association, à savoir l’Event Confederation. Lors du premier confinement, les autorités ont pris des mesures en négligeant complètement notre secteur. Grâce à ce regroupement, nous leur avons fait prendre conscience de sa valeur économique : il emploie quelque 80.000 personnes. 

Après deux ans de galère, les entreprises événementielles ont repris leurs activités à plein régime. Quelle est la situation du secteur aujourd’hui ?

Le redémarrage s’avère laborieux en raison de la longue période d’arrêt et de l’inadéquation des mesures de soutien aux besoins particuliers de notre secteur. De nombreux employés ont cherché du travail ailleurs, par exemple dans la construction et l’horticulture. Le chômage temporaire, qui a fait perdre aux personnes une partie de leurs revenus, a bel et bien provoqué un exode. Nous estimons et espérons cependant que beaucoup reviendront à cause de leur passion pour le métier. Par ailleurs, cette paralysie n’a bien sûr pas été profitable pour les jeunes travailleurs, qui ont perdu le contact avec la profession.

Il y a donc beaucoup de postes vacants ?

Énormément. C’est aussi l’une des raisons pour lesquelles nous avons conçu cette campagne B2B avec l’ACC. Je travaille moi-même dans l’événementiel depuis 27 ans, et c’est la première fois que j’assiste à une telle pénurie de main-d’œuvre chez les fournisseurs pour assurer la livraison de certains produits et services. 

Qu’entendez-vous par aide adaptée ?

Nous avons reçu des aides, mais peut-être pas assez ou pas les bonnes. C’est un point qui a déjà été soulevé auprès des autorités. À l’étranger, les agences ont pu par exemple décider plus librement la manière d’employer ces aides financières. Chez nous, l’accent a été mis sur le chômage temporaire. Une grosse partie des aides supplémentaires ont été définies au niveau régional, ce qui a débouché sur de grandes différences entre les régions. Aux Pays-Bas et en Allemagne, les agences événementielles ont notamment profité de la crise pour développer de nouvelles stratégies de marketing ou pour mettre de l’ordre dans leurs stocks. Cela a aussi été le cas chez nous, mais avec de graves conséquences pour les réserves financières des entreprises. 

De nombreux acteurs ont-ils disparu ?

Difficile à dire, actuellement. Les entreprises ont tout fait pour garder la tête hors de l’eau. En revanche, certaines agences ont dû réduire leurs effectifs. Une étude menée par la haute école Karel de Grote Hogeschool cite un chiffre qui donne à réfléchir. Sa dernière enquête auprès des entreprises du secteur a révélé que 51% d’entre elles ont envisagé de cesser leurs activités.

A l'inverse, de nouveaux acteurs sont-ils apparus - je veux parler des sociétés spécialisées dans les événements hybrides ou virtuels ?

Pendant la crise sanitaire, nous avons constaté que les sociétés audiovisuelles s’étaient approprié ces événements hybrides. Les membres de l’ACC pensent qu’il s’agit là d’une tendance à court terme. Les entreprises se rendront vite compte de la valeur ajoutée que procure une agence spécialisée. Je suis néanmoins convaincue que les événements hybrides ne vont pas disparaître. Les clients réfléchiront davantage aux événements qu’ils souhaitent organiser à certaines occasions, en fonction du contenu. Il s’agira tantôt d’un événement hybride, tantôt d’un événement en présentiel.  

Le secteur a-t-il besoin de profils différents pour organiser un événement en période post-Covid ?

Non, la seule différence est que nous serons encore plus confrontés à toutes sortes de règles. Il y a toujours davantage de conditions à respecter. En soi, cette professionnalisation est une bonne chose, mais elle ne doit pas primer sur tout. 
Dans le passé, nous pouvions concevoir un événement dans un vieux bâtiment et y organiser des choses formidables pour le client. Aujourd’hui, il faut remplir une foule de conditions, telles qu’un plan d’urgence, une sortie de secours, les normes en matière de ventilation, divers permis à obtenir, etc. C’est plutôt contre-productif. 

Vous pensez que la pandémie a encore accéléré ce mouvement ?

J’en suis persuadée. La réglementation s’est accrue énormément. Jusqu’il y a peu, nous demandions par exemple aux organisateurs d’un événement s’il fallait tenir compte de préférences alimentaires ou de certaines allergies. Maintenant, ce genre de questions doit vraiment suivre des règles strictes. Nous sommes obligés de demander à nos salariés de bien les connaître.

En quoi la campagne de l'ACC est-elle nécessaire ?

Nous menons cette campagne en vue de transmettre un message positif aux annonceurs et aux entreprises et pour soutenir ainsi le redémarrage. Après une période d’inactivité, les agences événementielles sont désormais submergées de demandes. Ce n’est pas sans conséquences : délais plus longs pour mettre en place les événements, difficultés à trouver des sites et du personnel, prix plus élevés, moins de temps pour participer à des pitches, etc. 
 
Concrètement, la campagne s’articule autour de quatre piliers et vise à conseiller les annonceurs qui souhaitent organiser un événement. Les deux premiers piliers ont trait aux temps d’attente plus longs : il faut planifier son événement bien à l’avance et adapter son timing en conséquence. En outre, les annonceurs doivent ajuster leurs budgets, car tout est devenu beaucoup plus cher : équipements, énergie, construction des stands, décoration, services de restauration, lieux des événements, hôtels. Ces deux derniers acteurs sont sur les genoux et ne permettent qu’une marge de négociation très faible. Enfin, le quatrième pilier concerne la nécessité de respecter la charte établie par l’ACC sur les pitches. 

Faut-il de nouveau insister sur cette charte ?

Une telle charte existe depuis plus longtemps dans le monde des agences de communication, et les annonceurs en tiennent davantage compte que sur notre marché. Notre travail est sous-estimé par certains. Après avoir reçu la demande d’un client, nous réfléchissons à la cible et aux messages à transmettre, puis nous cherchons une date et un lieu appropriés, un traiteur, un concept, etc. Cela prend beaucoup plus de temps qu’on ne le croit, nous ne proposons jamais de formule standard. 

Qu’attendez-vous encore du gouvernement ?

Qu’il arrête de jouer au ping-pong en prenant des mesures. Annoncer le vendredi après-midi que certaines choses seront interdites dès le vendredi soir, c’est vraiment hallucinant. Le baromètre devrait résoudre ce problème. 

Nous attendons surtout de la cohérence et une bonne communication avec notre secteur. Nous voulons également que l’on mette en place des subsides adaptés, que l’on prolonge les mesures d’aide, parce qu’elles sont indispensables pour les entreprises de notre secteur. 

Notre flux de trésorerie est différent de celui d’un magasin ou d’un restaurant. Ces derniers perçoivent des revenus immédiats dès leur réouverture, tandis que nous devons souvent attendre la fin de l’année pour être payés pour les événements organisés au printemps, par exemple. Le gouvernement nous offre des prêts avantageux, mais nous pensons qu’il s’agit de mesures différées. Nous voulons continuer à attirer l’attention sur ce problème. 

J’appelle donc toutes les agences événementielles à se joindre à l’ACC pour pouvoir donner plus de poids à nos revendications. 

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