Nl

TECH

La technologie peut-elle sauver le monde?, par Fons Van Dyck (Think BBDO)

Mercredi 27 Septembre 2023

La technologie peut-elle sauver le monde?, par Fons Van Dyck (Think BBDO)

La semaine dernière, la Maison du Futur, à l'allure futuriste comme il se doit, a été inaugurée à Vilvorde avec beaucoup d'intérêt. Les visiteurs y sont immergés dans les prouesses de l'innovation technologique qui définira notre vie et notre travail à l'avenir. La technologie contribuera à un monde meilleur, dit le mantra, et pas seulement à Vilvorde. Mais c'est surtout la manière dont la technologie et l'innovation sont intégrées dans un mouvement social qui crée un véritable progrès.

Les défis pour l'avenir sont plus importants que jamais. Les recettes du passé ne garantissent vraiment pas le succès futur. C'est pourquoi nous devons plus que jamais opter pour l'innovation et la créativité, au sens le plus large - de la technologie à l'organisation de la démocratie en passant par de nouvelles formes de vie en commun. Ce n'est pas seulement une tâche pour les "entrepreneurs", mais aussi pour les artistes et les chercheurs, ainsi que pour les pouvoirs publics. Nous ignorons souvent - ou nous oublions - que bon nombre des plus grandes innovations technologiques (de l'internet aux médias sociaux en passant par l'iPhone) sont le fruit d'efforts de recherche et d'un soutien financier du gouvernement, et même de l'appareil militaire américain. 
 
Les germes du succès mondial de la mode belge, et en particulier celui des célèbres "Six d'Anvers", ont été posés au siècle dernier par le plan de soutien du gouvernement fédéral à l'industrie textile moribonde. Aujourd'hui encore, l'Union européenne fait des choix stratégiques en lançant des programmes de recherche et d'investissement dans des domaines stratégiques : de la transition énergétique aux microprocesseurs (pensez à l'Imec à Louvain). L'innovation est l'oxygène de demain. 
 
Si l'histoire ne se répète jamais tout à fait, c'est précisément grâce au pouvoir de l'innovation et de la créativité. À cet égard, les progrès de l'intelligence artificielle constituent l'un des principaux aiguillages vers l'avenir dans de nombreux domaines de la société (principalement les soins de santé). Mais la technologie représente aussi potentiellement une menace. Dans un laboratoire fermé, la technologie est neutre, alors que dans un contexte social ouvert, cette même technologie devient rapidement le jouet de forces et de contre-forces, avec de bonnes, mais souvent de moins bonnes intentions. L'autorégulation ne suffit alors pas ; il faut un pilotage social, un ajustement et une régulation par les gouvernements. C'est ce que demandent aujourd'hui même les pionniers de l'IA (et de ChatGPT en particulier). Et c'est important. 
 
Il est donc indispensable d'investir dans l'innovation fondamentale et de créer un cadre dans lequel les universités et les entreprises peuvent développer de nouvelles technologies. Mais il est faux de croire que la technologie et l'innovation garantissent automatiquement plus de progrès. Il faut avant tout une société composée de citoyens et d'organisations de la société civile responsabilisés, ainsi qu'un gouvernement qui les guide. 

Le célèbre professeur du MIT, Daron Acemoglu (cité pour le prix Nobel d'économie) et son collègue Simon Johnson ont récemment écrit un livre brillant à ce sujet : "Power and Progress", qui traite de la lutte millénaire pour la technologie et le progrès. Cette lutte pour le pouvoir social, qu'ils préconisent également, consiste à veiller à ce que la technologie et l'innovation ne déraillent pas, n'accroissent pas les inégalités et n'asservissent pas les êtres humains, mais à ce qu'elles contribuent au progrès et au bien-être de tous. Cette tâche est plus urgente qu'elle ne l'a jamais été. 
 
Dans mon livre "The Future is Back", jévoquerai plus en détail la valeur de la technologie et de l'innovation dans un contexte social. Ce livre sera publié par Pelckmans au début du mois de décembre.

Archive / TECH