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Sables mouvants, par Griet Byl (MM)

Dimanche 10 Septembre 2023

Sables mouvants, par Griet Byl (MM)

Le 7 septembre dernier, Google annonçait donc que les API de sa Privacy Sandbox seraient désormais accessibles à tous dans Chrome. Selon les spécialistes de Mountain View, il s'agirait d'une étape importante vers un Internet plus respectueux de la vie privée.

Pour ceux d'entre vous qui viennent de Mars (ou de Vénus, bien sûr), l'initiative Privacy Sandbox, à l'origine fortement critiquée et fréquemment ajustée depuis, remonte à 2019 déjà. Elle avait été lancée comme alternative aux cookies tiers qui devraient disparaître progressivement de Chrome en 2024 (inchallah !). D’après Google, son bac à sable devrait à la fois plaire aux utilisateurs en améliorant la protection de leurs données personnelles et charmer également les annonceurs en continuant à leur garantir l’accès à des audiences segmentées, sans encourager toutefois des tactiques invasives, comme le fingerprinting.

Quant à savoir si les nouvelles API garantissent effectivement une meilleure protection des données personnelles, les avis des spécialistes divergent sensiblement. Par exemple, des voix critiques sur divers forums de développeurs soulignent que les API en question, tout comme les cookies, suivent la navigation des internautes et protègent en fait plutôt les intérêts de Google contre ceux d'autres collecteurs de données. D'autres se demandent si ces API permettent bel et bien de cibler efficacement les consommateurs, sachant qu’elles fonctionnent avec des segments assez larges, ce qui justifierait la question de savoir si le jeu en vaut la chandelle. 

Quoi qu'il en soit, l'annonce n’a pas vraiment fait de vagues dans le monde de la tech. Est-ce parce que le terrain avait été efficacement préparé par le lancement de la version bêta ? Ou parce que la DMA vient de désigner Google comme "gatekeeper", ce qui pourrait sembler rassurant ? Parce que personne ne croit encore que ces fichus cookies tiers disparaîtront vraiment un jour ? Ou est-ce dû au fait que les médias, les agences et les annonceurs se concentrent principalement sur leurs propres possibilités de ciblage ? 

Ou est-ce parce que les spécialistes du marketing, coincés qu'ils sont entre la hausse des coûts et les économies contraignantes, ont d'autres chats à fouetter que le ciblage dans un monde sans cookies ? Sans doute aussi sont-ils trop occupés à se réinventer pour « éviter de se faire supprimer leur emploi par des directeurs financiers mécontents, en dépit du fait qu'ils sont les seuls à représenter les consommateurs à la table de la direction », comme l'a relevé Mark Ritson lors du Media Date de l'UBA ? Consommateurs qui par ailleurs en ont plus qu'assez de se faire cibler si l’on en croit plusieurs études…

Quoi qu’il en soit, d’après le dernier benchmark de l'UMA, la publicité digitale - dont le targeting fait partie intégrante de l’ADN - n'a pas encore atteint son plafond. Au cours du premier semestre, elle représentait 34% des investissements publicitaires globaux, un pourcentage en légère hausse par rapport à la même période l'année dernière et qui égale pour ainsi dire la part de la télévision (35%). Pour la première fois, la vidéo et les réseaux sociaux dépassent le display aussi, ce qui n'est pas illogique étant donné la consommation de médias d’une part et les coûts des différents supports online de l’autre. 

Cette histoire de bac à sable n’est donc pas si anodine que ça. Mais que cela ne vous empêche surtout pas de profiter de ce dimanche ensoleillé !

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