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Ne pourrait-on pas en avoir un peu plus ?, par Peter Verbiest (Bonka Circus)

Mercredi 27 Mars 2024

Ne pourrait-on pas en avoir un peu plus ?, par Peter Verbiest (Bonka Circus)

Les avancées nécessitent d’être soutenues. Ce soutien n’est possible qu’avec une certaine stabilité. Or, ces progressions et cette stabilité font actuellement défaut. Dans les campagnes, les gens ne savent plus à quel saint se vouer : les agriculteurs disparaissent, les lignes de bus disparaissent, les agences bancaires disparaissent, les magasins disparaissent. Les solutions proposées, qu’il s’agisse d’agriculture durable, de bus d’appel ou de solutions bancaires digitales ne sont pas perçues comme des réponses satisfaisantes. En outre, dans la société en général, la polarisation s’accentue concernant les comportements que d’autres défis sociétaux tels que la crise climatique, l’accroissement des inégalités ou la diversité au sein de la société exigent de nous : manger moins de viande, voyager moins, prendre moins souvent sa voiture, disposer de moins de services, de moins de liberté de faire ce qu’on veut. 

Pour faire court, le comportement attendu est souvent une histoire de "moins". Alors que justement, le comportement humain est souvent déterminé par la "peur du manque ". Nous manquons donc également de "solutions globales". Et aussi : il nous manque des histoires de "plus". La première concerne les développeurs de produits et les responsables politiques. La seconde les storytellers. 

Qu’est-ce qu’une solution globale ? Dans le monde de l’informatique, les solutions globales sont celles qui se composent de plusieurs couches et qui, pour cette raison, offrent un package complet : du front au back end, du hardware au middleware, de la base de données aux applications. Traduites en politique, ou en produits et services proposés par une entreprise, les solutions globales doivent aller au-delà du tout premier rôle pour lequel elles sont conçues. Un bus n’est pas une solution globale s’il ne fait que vous transporter d’un point A à un point B à un prix abordable. Il doit également arriver à l’heure, offrir une expérience agréable et être 100% durable. L’agriculture ne doit pas se contenter de produire des aliments savoureux, elle doit respecter la nature tout en garantissant un salaire décent aux agriculteurs. En plus d’être durables, les hamburgers vegan doivent également avoir du goût, et tout le monde doit pouvoir se les payer. 

Pour relever les défis auxquels nous sommes confrontés, nous avons plus que jamais besoin de ces solutions globales. Impossible, dites-vous ? Elles existent cependant déjà dans bien plus de secteurs qu’on ne le pense. 
 
Au Brésil, le BRT (Bus Rapid Transit) - des bus en site propre équipés du Transit Signal Priority qui leur permet de passer plus vite aux feux grâce à des capteurs -, est l’une de ces solutions globales. Les grandes portes de ces bus et le prépaiement permettent également de monter plus rapidement à bord. Le BRT est donc beaucoup plus rapide et plus attrayant que la voiture. En Suède, Max Burgers propose des hamburgers durables d’une saveur sans pareille et à un prix abordable. Aux Pays-Bas, Marcel propose des produits de nettoyage et d’entretien qui non seulement sentent bon, nettoient parfaitement la maison mais protègent aussi la planète. Le biophilic design intègre les bâtiments dans la nature, avec des toitures vertes et des conceptions qui s’inspirent de modèles naturels. Cela permet d’améliorer la santé physique et mentale des habitants ainsi que l’isolation, de réduire les coûts énergétiques et d’optimiser la collecte des eaux de pluie. Et ainsi de suite. 
 
L’essentiel à retenir : avec une solution globale, on ne doit jamais faire de compromis douloureux. Ses nombreuses couches offrent de nombreuses réponses. Elles garantissent un large soutien, et donc la stabilité et les progressions. Nous en avons désespérément besoin dans tous les secteurs. Il y a donc du pain sur la planche pour les développeurs et les responsables politiques. 
 
Mais à côté de cela, les storytellers ont aussi du boulot. Car jusqu’à présent, nous n’avons pas réussi à donner aux avancées nécessaires une image attrayante. 
 
Il nous appartient de ne plus présenter les nouveaux choix comme une histoire de "moins" mais de "plus", et de susciter ainsi le désir. L’alimentation vegan, ce n’est pas seulement manger moins de viande et absorber moins de calories. C'est avant tout d’une histoire d’alimentation savoureuse, variée, multiculturelle, saine et, en plus, bonne pour la planète. Voyager en train, ce n’est pas seulement causer moins de dégâts à l’environnement. C’est surtout une histoire de tranquillité accrue, une vraie sensation de voyage, davantage de conversations, une meilleure qualité de l’air, plus de respect de l’environnement et bientôt, espérons-le, plus de rapidité et des billets meilleur marché. 

Serait-ce un peu tiré par les cheveux ? Pas du tout. Permettez-moi de conclure par un exemple concret : l’entreprise suédoise Max Burgers ne vend pas ses hamburgers comme une "alternative verte", elle veut simplement faire les meilleurs hamburgers du monde. Dans sa communication, elle utilise tous les codes émotionnels que nous connaissons et qu’utilisent les marques de burgers traditionnelles, et donne à ses burgers des noms appétissants : le Big Max, le Supreme Original ou le Jalapeno Ranch Cheeseburger. En tant qu’acheteur, vous n’avez jamais l’impression de manquer de quoi que ce soit. Au contraire, vous y gagnez :  les burgers ont plus de goût, vous en avez plus pour votre argent, vous en retirez plus de plaisir, et c’est meilleur pour vous et pour la planète. 
Ne demanderions-nous pas à tous les designers, ingénieurs, sociologues et décideurs politiques de se consacrer à trouver des solutions globales ? Et aux storytellers d’écrire de nouvelles histoires de "plus" pour raconter ces nouveaux choix ? Nous aurions tous à y gagner. 

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