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L'IA, combien d'Oxy ?, par Fred Bouchar (MM)

Dimanche 4 Février 2024

L'IA, combien d'Oxy ?, par Fred Bouchar (MM)

Fort heureusement, c'est une affaire assez peu courante dans le secteur. Aux Etats-Unis, Publicis Health vient de conclure un accord avec le DOJ, s'engageant à payer $350 millions pour résoudre un litige lié au scandale des opiacés. Ou plutôt, devrait-on dire, pour éviter un procès, sans doute plus dommageable pour l'image du groupe que ces quelques centaines de millions de dollars que tout le monde aura vite fait d'oublier.
 
Le dossier date de 2021, lorsque l'État du Massachusetts déposa une plainte au civil contre Publicis Health, accusé d'avoir contribué à la crise des opiacés en soutenant les équipes marketing de Purdue Pharma pour convaincre le corps médical de prescrire l'OxyContin. 
 
Symbole de cette crise et "popularisé" - si l'on ose dire - par les séries "Painkiller" de Netflix et "Dopesick" de Disney+, l'Oxy était le produit vedette du labo de la famille Sackler, accusée d'avoir rendu accro et tué des centaines de milliers d'Américains avec cet antidouleur surpuissant. Une machine à cash, qui aurait généré plus de $35 milliards de revenus grâce à des campagnes ciblées sur les généralistes.  
 
« Pendant une décennie, Publicis a aidé des fabricants comme Purdue Pharma à convaincre les médecins de surprescrire des opiacés, alimentant directement cette crise et causant la disparition de populations dans l'ensemble du pays », a déclaré Letitia James, procureure de l'État de New York, ajoutant que Publicis était la première agence de pub à conclure un accord de ce type dans le cadre de la crise des opiacés outre-Atlantique.
 
Publicis Health s'est défendu, en rappelant que les activités concernées avaient été réalisées par l'agence Rosetta, rachetée par le groupe en 2011 et fermée quatre ans plus tard. 
 
Publicis Health assure aussi que toutes les prestations réalisées par cette agence recouraient à des outils et des terminologies approuvés par la FDA – laquelle avait donné son blanc-à l'OxyContin, il est vrai - et que ceux-ci n'ont pas été utilisés sur les consommateurs, mais uniquement auprès de prestataires de soins de santé… De fait, on ne peut pas accuser l'agence d'avoir vraiment innové pour le coup : elle n'a rien fait d'autre que cibler les prescripteurs, suivant en cela la reco d'Arthur Sackler, considéré comme l'inventeur des techniques de DM appliquées aux Big Pharma.
 
Pour en revenir au coût de cette cure de désintox à l'Oxy - soit l'équivalent des investissements récemment annoncés dans le cadre du développement de l'IA -, de manière assez cynique, Publicis a rappelé qu'un peu moins de la moitié de ces $350 millions avait été remboursé par ses assureurs. Du reste, cet accord avec la justice US n'aura aucun impact sur la marge 2023, ni sur celle de l'exercice en cours. Ouf. Les investisseurs peuvent être rassurés. 

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