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Agences de pub B Corp : un oxymore?, par Stéphane Buisseret et Eric Hollander (Air)

Jeudi 29 Septembre 2022

Agences de pub B Corp : un oxymore?, par Stéphane Buisseret et Eric Hollander (Air)

En quelques jours, trois agences créatives belges sont devenues B Corp. Par ordre alphabétique, il s’agit de Air, Bonka Circus et d’une troisième que nous ne priverons pas du plaisir de l’annoncer elle-même dès que ce sera officiel. 

Pour rappel, B Corp est une certification accordée exclusivement aux entreprises qui répondent aux exigences les plus hautes en matière de performances sociales et environnementales. On parle donc autant d’impact écologique positif que de bien-être des employés, de gestion responsable ou de transparence avec tous les stakeholders.
 
Autant dire qu’a priori, "agence de publicité B Corp", c’est presque un oxymore, une contradiction dans les termes.
 
Pour être certifiées, ces trois agences ont donc dû faire un long travail, avant tout sur elles-mêmes.
 
Certes, elles ont toutes les trois un indiscutable passé d’engagement. 
 
Mais comme toutes les agences créatives, elles sont aussi individualiste, hyper compétitives et animées par des égos surdimensionnés… Même pour une agence engagée, devenir B Corp est une révolution culturelle !
 
Ainsi, commencer cette chronique en citant des concurrents aurait été une performance quasiment impossible il y a quelques années.
 
Mais ce n’est ni la seule ni la plus importante, nous pouvons maintenant en témoigner de l’intérieur.
 
1) Ne plus chercher à être la meilleure entreprise du monde, mais la meilleure pour le monde. Aïe. 
 
Dès sa fondation en 2006, B Lab - le mouvement qui a initié la certification B Corp - interrogeait la notion de "succès" dans les affaires, en proposant aux entreprises de mettre leurs performances au service de l’intérêt général pour le plus grand bénéfice de la planète et de tous ceux qui l’habitent (B Corp signifie Benefit Corporation).
 
On pourrait  penser que ce nouvel état d’esprit allait être difficile à adopter pour notre secteur. Il n’en est rien. Les capacités d’adaptation dont il a toujours fait preuve sont sans limites. En quelques années, ce métier qui adore s’auto-congratuler et multiplier les Awards en tous genres a simplement modifié les critères d’attribution de ses médailles. Sont aujourd’hui distinguées les marques et les agences qui travaillent à rendre le monde plus fréquentable ou à lui assurer un avenir, et c’est tant mieux. Reste à ajouter un peu de rigueur, de régulation et d’accompagnement pour éviter le greenwashing et on sera sur la bonne voie.
 
2) Signer la déclaration d’interdépendance. Ouille.
 
Dans les secteurs aussi concurrentiels que le nôtre, la confidentialité est clé et la paranoïa bien présente. Mais quand on devient B Corp, on signe une déclaration d’interdépendance par laquelle on s’engage à rejoindre la communauté des entreprises engagées, à échanger, à apprendre les uns des autres, à mettre en commun les meilleures pratiques ; bref, à tout faire pour accélérer le changement. 
 
Pour les signataires de cette chronique, ce ne fut pas une décision évidente d’apporter à l’industrie publicitaire belge son Campaign Neutralizer, un algorithme développé pour Air par CO2logic permettant de calculer, réduire et compenser l'empreinte carbone du processus de production de toutes les campagnes. Mais en faire un avantage compétitif aurait manqué de sens et de cohérence. Et nous sommes heureux de notre choix.
 
3) L’après B Corp ? Ouch.
 
Il n’y a pas d’après. B Corp est un processus d’amélioration permanent. Tous les trois ans les entreprises B Corp sont ré-évaluées. Si elles n’ont pas progressé, elles ne sont plus certifiées, c’est aussi simple que ça. C’est donc un processus exigeant, mais aussi contagieux : de plus en plus de sociétés souhaitent rejoindre les rangs des 5.500 entreprises qui forment aujourd’hui cette communauté mondiale (dont une quarantaine en Belgique).
 
 C’est une très bonne nouvelle. Quand B Corp sera devenu la norme, quand le label ne sera plus un différenciateur, quand ce ne sera même plus un sujet d’article pour MM Blue, c’est que le monde ira mieux. D’ici là, il y a du boulot.
 

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