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Hackvertising : le retour, par Fred Bouchar (MM)

Dimanche 19 Juin 2022

Hackvertising : le retour, par Fred Bouchar (MM)

Lovetheworkmore. Vous connaissez peut-être cette plateforme lancée par deux jeunes créatifs vietnamiens sur l'air de "comment j'ai hacké les Cannes Lions pour protester contre ses tarifs exorbitants" : un clone brut de décoffrage mais gratuit du site payant Lovethework ; il rassemble les campagnes primées depuis 2006. Cocasse : AdWeek nous a appris cette semaine que Quynh Tran et Toan Mai avaient décidé de l'inscrire dans les compétitions PR et Direct du festival qui débute ce lundi. Les organisateurs apprécieront. Ou pas.
 
Lovetheworkmore, c’est un peu la mise en abyme de l’hackvertising, popularisé en 2018 par… les Cannes Lions. Cette année-là, dans un Grand Auditorium Lumière plein à craquer, Fernando Machodo, l'ex CMO de Burger King, expliquait les recettes de son "hacker mindset" : « Pour se mettre au hackvertising, il faut définir un système à hacker, l'étudier, trouver une manière enrichissante pour la marque de le détourner, appeler ses avocats et commencer l'attaque! » 
 
Et le Roi du Burger d'enflammer la Croisette avec ses activations "Google Home of The Whopper""Whopper Detour""Scary Clown Night", "King Popcorn" et autres. 
 
Dans la foulée, le terme hackvertising se popularise un peu partout : il rentre dans la liste des tendances "sociétales et communicationnelles" de Kantar et il trouve même sa place dans la rubrique "What is" du site de l'UBA
  
Plus qu'à son tour victime des hackers, la pub prend en quelque sorte sa revanche : aujourd'hui, le hacking publicitaire se déploie de nombreuses manières sur des "cibles" multiples et variées - les Apple Stores sont piratés par Back Market, les castings pubs par Dove, les algorithmes de profilage par l'Unesco, nos rêves par Coors et l'Etat russe… par à peu près tout le monde. 
 
Des cases que nous vous présentons ci-après. A coup sûr, certains d'entre eux se retrouveront dans le prochain palmarès des Cannes Lions, tant les créatifs aiment s'amuser de ces transgressions dans une posture "Rebel with a cause". 
 
Mais attention au retour de bâton. En 2019, Leo Burnett Tailor Made, l'agence brésilienne de The North Face, avait proposé à son client une idée lui permettant d'arriver en tête des résultats de recherche sur Google, sans passer par la case payante. Comment ? En opérant des placements de produit sur des photos Wikipedia. Sachant que la première page qui apparaît à l'écran lorsque vous recherchez une destination est souvent celle de l'encyclopédie en ligne, l'agence avait réalisé des shootings aux quatre coins du monde pour immortaliser des spots prisés par les amateurs de rando, en prenant soin de placer plus ou moins discrètement des vêtements et accessoires The North Face sur les photos. Lesquelles ont ensuite remplacé les images Wikipedia officielles de ces différents lieux. 
 
L'agence se vantait d'une collaboration avec l'encyclopédie participative. En réalité, il n'en était rien. La fondation Wikimedia a vertement dénoncé le coup marketing, qualifié de "dégradation de propriétés publiques". « Quand The North Face détourne la confiance que vous accordez à Wikipedia pour vous vendre plus de vêtements, vous avez le droit d’être en colère », pouvait-on lire sur son site web… La marque n'a rien pu faire d'autre que de présenter platement ses excuses.
 
Sur ce, bon Cannes à tous les festivaliers !
Et bon courage à ceux qui tentent encore de hacker les grèves pour rejoindre Nice.

Update : j'ai oublié de citer le hack du British Museum - Grand Prix Radio & Audio. Voir également ici.
 

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