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Quand Messi découvre le job hopping, par Pieter Claeys (TBWA\Chiat\Day\New York)

Mercredi 15 Septembre 2021

Quand Messi découvre le job hopping, par Pieter Claeys (TBWA\Chiat\Day\New York)

C'est toujours un spectacle étrange. Lionel Messi portant un autre maillot que celui de Barcelone ou de l'Argentine. Ici c'est Paris. Lionel qui regarde avec l'enthousiasme enfantin d'un jeune de 16 ans débutant en France. Lionel qui est sur le point de découvrir les joies de l'alternance.
Ne vous méprenez pas, j’ai une immense admiration pour les personnes qui travaillent dans la même boîte pendant des années, partageant aussi bien les succès que les échecs. Bref, le genre de salariés que les employeurs chérissent. Et on les comprend. Non, lorsque je plaide en faveur du job hopping, je ne veux en aucun cas sous-estimer tous ces collaborateurs loyaux qui forment la colonne vertébrale de l’entreprise.

Mais il y a aussi des choses intéressantes à dire sur l’autre camp, celui des "job hoppers". Ces travailleurs qui vont et viennent. Et, espérons-le, laissent une trace de leur passage. Ceux qui font régulièrement l’objet d’un communiqué de presse envoyé chez MM après un changement d’emploi. « Ah, tu travailles pour cette boîte, maintenant ? Je pensais que tu étais encore chez X. » Les effectifs de la plupart des agences de publicité en Belgique changent plus rapidement que les membres du groupe Fleetwood Mac…

Il n’empêche que le job hopping est plutôt mal vu. On le considère comme un manque de loyauté envers l’employeur et comme une tache dans un CV. Permettez-moi de rétablir cette injustice flagrante. Les job hoppers sont loyaux, et les employeurs ont aussi besoin d’eux. Je m’explique. Du moins si je ne me laisse pas distraire avant la fin de cette chronique. Car on ne sait jamais, je pourrais bien changer de sujet en cours de route.

Les job hoppers ont un don spécial pour trouver des solutions et sont les rois de la débrouillardise. Après tout, ce n’est pas évident de relever régulièrement un nouveau défi professionnel. Il faut chaque fois apprivoiser le nouveau cadre de travail. Oser soumettre ses idées aux nouveaux collègues. Apprendre les pratiques en vigueur dans l’entreprise. Cela demande du courage, de l’empathie et une bonne capacité d’adaptation. Or, ce sont précisément les aptitudes dont on a besoin quand on planche sur un briefing pour un nouveau client.

Chaque agence pense et travaille différemment, en étant fidèle à sa propre culture d’entreprise. « C’est comme ça que nous avons toujours fait. » Un point de vue défendable, certes. Le problème, c’est qu’une telle vision peut se convertir en camisole de force.

Or, les job hoppers ne s’accommodent pas d’un tel carcan. Ils lancent des idées révolutionnaires qui chamboulent le système. Anarchie ! Chaos ! Confusion ! Les job hoppers jettent un pavé dans la mare, mais c’est une bonne chose, car c’est au point d’impact entre chaos et structure que jaillissent les nouvelles idées.

Grâce à l’expérience acquise dans différentes entreprises, les job hoppers n’ont pas leur pareil pour détecter les forces et les faiblesses d’une organisation. Ils évaluent en un rien de temps les processus et proposent souvent des solutions intéressantes. Chaque job hopper engagé est en réalité une aubaine pour le management.

On dit parfois que nous portons en nous un peu de toutes les personnes que nous avons rencontrées. Eh bien, les job hoppers ont côtoyé une foule de personnes intéressantes dans bon nombre d’agences différentes. Engager un job hopper revient donc à profiter de tous ses échanges passés. C’est une façon d’introduire dans l’entreprise un riche éventail d’idées.

Pensez-y la prochaine fois que vous vous retrouverez en face d’une personne ayant changé régulièrement d’emploi. Les job hoppers ne trichent pas sur leurs compétences, et c’est précisément la raison pour laquelle ils se montrent loyaux envers chacun des employeurs chez qui ils travaillent.

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