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MEDIA TALKS

Le quatrième pouvoir, par Daan Killemaes (Rédacteur en chef, Trends)

Dimanche 8 Décembre 2019

Le quatrième pouvoir, par Daan Killemaes (Rédacteur en chef, Trends)

« Autrefois, on pouvait aisément camoufler les tours de passe-passe budgétaires. Aujourd’hui, c’est devenu impensable, car la presse exerce une fonction de contrôle beaucoup plus développée », nous confiait récemment un responsable politique chevronné. Ces propos illustrent combien le pouvoir des médias s’est accru au cours des dernières années. Les médias sont considérés à juste titre comme un quatrième pouvoir, venant s’ajouter aux pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire. On peut même se demander si cette quatrième place est bien la bonne dans la hiérarchie des pouvoirs sociaux. Pour citer un membre éminent du conseil d’administration d’une grande banque belge : « Vous ne vous rendez pas compte de l’impact de ce que vous publiez. La moitié de l’ordre du jour de notre conseil d’administration est dictée par les nouvelles des médias. »

Si l’on peut regretter que les médias aient acquis un tel pouvoir, il faut toutefois apporter quelques nuances. Les journalistes livrent un compte-rendu des événements, mais ne formulent pas de solutions, même si le journalisme d’opinion, qui interprète et commente les faits, gagne du terrain. Les journalistes posent des questions, mais ils ne prennent pas de décisions. Les journalistes mettent au jour les faits, mais ils ne peuvent pas exercer le rôle de juge. Bref, les journalistes sont toujours des observateurs qui scrutent l’actualité de l’extérieur. S’ils devenaient des acteurs de terrain, ils renieraient leur fonction sociale et leur déontologie. 

Quand la presse joue correctement son rôle, elle constitue un contre-pouvoir nécessaire face aux acteurs politiques, chefs d’entreprise et tous autres décideurs. La lumière du jour est le meilleur désinfectant contre la corruption, les abus de pouvoir ou les mauvaises pratiques en général. Quand la société est bien informée, il devient plus difficile pour les responsables politiques de se payer la tête des gens. La presse peut effet leur faire payer le prix fort en cas de magouilles, de sorte que l’envie leur passe généralement de s’y livrer. 

C’est de cette manière que le magazine Trends, notamment, s’emploie à contribuer à renforcer l’économie et à assainir la démocratie. Ce pouvoir réel se justifie à condition de respecter quelques règles de base. Ce que nous couchons sur le papier doit correspondre aux faits, mais aussi et surtout doit être rédigé en toute indépendance. Aussi longtemps que nous observons ce code, nous pourrons jouer un rôle de premier plan dans les débats de société en tant qu’observateurs et gardiens des faits. Précisons pour terminer que le décideur que nous citions plus haut n’éprouvait aucune nostalgie à l’égard du passé…